Comprendre les attributions de l’employeur en tant qu’administrateur du régime d’assurance collective dans les régimes assurés

Comprendre les attributions de l’employeur en tant qu’administrateur du régime d’assurance collective dans les régimes assurés

Quelques notions de base en assurance collective :

Selon l’article 2392 du Code civil du Québec (C.C.Q), « l’assurance collective couvre en vertu d’un contrat-cadre, les personnes adhérant à un groupe déterminé et, dans certains cas, leurs famille ou les personnes à leur charge ».

La notion du groupe La définition d’un fait l’objet de plusieurs sources législatives et réglementaires 2 complémentaires. Sans donner une liste exhaustive, pour qu’un groupe soit éligible à une assurance collective, les membres doivent généralement répondre aux quelques critères :
– l’existence d’un lien d’emploi avec un ou plusieurs employeurs ;
– appartenance des membres à une profession, ordre professionnel, association professionnelle ou occupation habituelle ;
– le groupe ne doit pas être constitué dans l’unique but de l’assurance
Le contrat-cadre d’assurance collective : peut être défini comme une relation contractuelle tripartie (assureur, preneur et adhérents) mais en réalité, les seules parties liées au sens contractuel sont l’assureur et le preneur.

Le preneur est le titulaire de la police ; typiquement il existe trois catégories de preneurs : l’employeur, le syndicat ou bien l’employeur et le syndicat. Dans cet article nous allons faire référence à l’employeur comme étant le preneur du contrat d’assurance collective.

Les adhérents font partie du contrat et sont les membres du groupe pour lesquels la police d’assurance collective a été souscrite par le preneur auprès d’une compagnie d’assurance.

La responsabilité de l’employeur au niveau de l’administration d’un régime d’assurance collective3

Le preneur devrait répondre à au moins quelques questions : quelles sont mes obligations en tant que administrateur ? Quelles seraient les conséquences pour mes employés et pour mon entreprise en cas d’erreur ou d’omission ? Le personnel désigné est bien formé et renseigné afin de bien répondre aux exigences légales ?
Selon l’article 61 de la R.A.L.A, le preneur doit être en mesure de pourvoir à l’administration du contrat-cadre. En conséquence, l’entreprise qui adhère à un régime collectif prend la responsabilité d’en faire l’administration et de veiller à son bon fonctionnement. Nous aimerions mentionner quelques obligations du preneur, notamment du preneur lorsque le preneur est l’entreprise, divisées en trois volets : l’adhésion et l’admissibilité, l’information aux membres, la gestion du changement et la terminaison.

L’adhésion et l’admissibilité :

En tant qu’employeur, vous n’êtes pas obligé de couvrir tous les employés, mais seulement ceux qui sont admissible en vertu du contrat cadre établi avec l’assureur (par exemple seulement les employés qui travaillent minimum 30 heures par semaine, ou seulement les cadres seront admissibles, etc.) ;
l’employeur est responsable de vérifier l’admissibilité des nouveaux employés et de ses personnes à charge et de s’assurer que les personnes admissibles adhèrent au régime selon les précisions du contrat-cadre (selon le délai de carence, la catégorie, etc.) ;

La RAMQ exige que l’employeur est tenu de prélever la prime de tout employé qui n’a pas prouvé qu’il est pas admissible à un autre régime collectif d’assurance médicaments et que selon la Loi sur l’assurance médicaments, des pénalités de 1 000$ à 10 000$ peuvent être imposées à l’employeur qui fait défaut à cette obligation.

Recommandation : faire des vérifications auprès du votre personnel et demander des preuves d’assurance (certificat d’assurance, attestation signé par l’employeur du conjoint, etc) et conservez les preuves ;
La vérification de l’exactitude des renseignements fournis dans le formulaire d’adhésion (date d’adhésion, occupation, statut marital, date de naissance, salaire, etc)
L’information aux membres et à l’assureur :
l’article 2401 C.C.Q4. stipule que le preneur à l’obligation de remettre adhérents les attestations d’assurance, les brochures et les cartes d’assurance
mettre à la disposition des adhérents et des bénéficiaires à des fins de consultation et impression l’original du contrat-cadre (la police)
informer les membres et l’assureur de tout changement intervenu dans l’admissibilité, les couvertures, la rémunération, le statut matrimonial,
aviser tous les membres de leurs droits en excédent du maximum assurable sans preuve médicale pour les protections vie et salaire.

Le régime d’assurance collective prévoit une prestation mensuelle de 66,67% en cas d’invalidité, avec un maximum sans preuves médicales de 3 000$ par mois. Julie a un salaire annuel de 70 000$. Elle aurait droit à une prestation mensuelle de 3 000$ sans preuve médicale et 889 $ avec preuves médicales (70 000*66,67%/12). L’employeur doit l’informer de ses droits et lui remettre le formulaire à remplir et aviser l’assureur.

Présenter à l’assureur une demande d’exonération des primes et fournir les pièces justificatives dans les six mois suivants le début de l’invalidité d’un employé
La gestion des changements :
suite aux changements dans la situation familiale ou si le conjoint perd son admissibilité, vous devez inclure un employé qui été exempté auparavant
Recommandation : faire des vérifications périodiques et mettre à jour les dossiers des employés
Il incombe à l’employeur d’aviser l’assureur de tout changement : de salaires, de protections (individuelle, familiale ou exemptée) et d’arrêt de travail (raison médicale, congé de maternité, congé sans solde ou mise à pied)

Marc travaille comme contrôleur. En décembre 2012 son salaire annuel était de 40 000$.En mars 2013 il a été promu et son salaire passe à 54 000$ mais son employeur ignore d’informer l’assureur. Suite à une dépression majeure, au 1er septembre 2013, Marc est en arrêt de travail. L’assureur lui verse une prestation de 2 222$ par mois (66,67% * 40 000/12) tandis qu’il aurait droit à 3 000$/mois. L’employeur peut être tenu responsable de la différence de 778$/mois car il a omis d’informer l’assureur du changement de salaire.

La terminaison d’un régime ou le départ d’un employé
L’employeur est tenu responsable d’informer les membres de leur droit de transformation de l’assurance vie collective en une individuelle en cas de terminaison du régime ou en cas de départ de l’employé, sans égard à sa situation médicale

L’Article 62 du R.A.L.A. exige que  « tout contrat d’assurance collective sur la vie doit donner à l’adhérent qui est radié de l’assurance avant l’âge de 65 ans du fait de la cessation de son emploi ou de son appartenance au groupe, la faculté de transformer tout ou une partie de l’assurance sur sa tête, à l’exception des garanties d’invalidité, en une assurance individuelle sur sa vie, dans les 31 jours de sa radiation, sans avoir à justifier de son assurabilité ».

L’employé doit s’adresser à l’assureur dans les 31 jours qui suivent la terminaison

Suite aux difficultés financières des 3 dernières années, la compagnie ABC Inc décide de de ne plus offrir un régime d’assurance collective à ses 50 employés. Le contrat prévoyait une couverture de 50 000$ en cas de décès et 50 000$ en cas de décès accidentel. ABC Inc ignore d’informer ses employés du droit d’assurance vie. Suite à un incendie dans Deux mois après, trois employés décèdent dans un accident de travail. L’employeur peut être poursuivi et tenu de dédommager les bénéficiaires pour un montant de 300 000$.

Conclusion
Il est important de préciser que de nos jours, les tribunaux sont enclins à considérer le preneur comme mandataire de l’assureur et d’accorder raison aux adhérents car en réalité ils ont un pouvoir de négociation et décisionnel limité par rapport à l’assureur ou au preneur (le contrat-cadre est un contrat d’adhésion). Plusieurs cas de jurisprudence peuvent être cités où les entreprises, qui ont fait défaut aux leurs devoirs d’administration ont été obligées de verser une prestation compensatoire d’assurance salaire ou même d’assurance vie.
Comme toute activité professionnelle, l’administration d’un régime collectif n’est pas à l’abri des risques potentiels d’erreur ou d’omission qui peuvent s’avérer lourds en conséquence découlant des poursuites civiles ou des pénalités. Une bonne compréhension de la réglementation en vigueur et une bonne gouvernance peuvent éviter des ennuis à l’entreprise.
Comme dans les PME c’est souvent un département ou une personne au sein de l’entreprise à qui l’administration est confiée, l’entreprise doit s’assurer qu’elle dispose du personnel qualifié ou elle l’option de déléguer cette tâche à une tierce partie pourrait s’avérer une option viable.

Par : Marius Balan, B.Sc. Actuariat, CRM
Conseiller, Assurances collectives & Gestion des risques, CRM
AMF, CSF, Risk and Insurance Management Society
GIRACO Groupe Solutions
Assurances collectives · Actuariat · Gestion des risques

 

1 Dans cet article nous ne faisons pas référence aux groupes auto-assurés, mais seulement aux ceux pleinement assurés
2 Art 2392 du Code civil du Québec ; Art 59 et 60 du Règlement d’application de la Loi sur les assurances ; Art 15.1, 16 – Loi sur l’assurance médicament) et règlementaires (le contrat d’assurance ; convention de travail, etc).
3 Il convient de noter que nous analyserons ici seulement la situation où l’employeur assume l’administration du régime d’assurance collective
4 Notations :
C.C.Q. – Code civil du Québec- CCQ
R.A.L.A. -Règlement d’application de la Loi sur les assurances
L.A.M.- Loi sur l’assurance médicaments